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Le bouffon des rois

Le bouffon des rois

Titel: Le bouffon des rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Francis Perrin
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sur tous autres chevaliers. »
    Impatient d’être adoubé, François coupa court au discours de
Bayard qui risquait de traîner en longueur :
    «  Bayard, il ne faut alléguer ici ni lois, ni
décrets. Faites selon mon bon vouloir et mon commandement. »
    Le preux chevalier prit sa lourde épée un peu ébréchée et
nettoyée du sang de l’ennemi pour en toucher rudement par deux fois les épaules
de François I er . La cérémonie était terminée.
    Cette victoire fut l’ouverture d’un règne glorieux.
François I er impressionna grandement tous les princes et
souverains des pays d’Europe par ce coup d’éclat. Depuis huit années le hasard
avait voulu que le roi fut présent dans la plupart des victoires françaises.
Moment inoubliable : le jour où nous fîmes notre entrée dans la ville de
Milan sous les arcs de triomphe élevés par Léonard de Vinci. Quelle rencontre
magistrale avec cet homme universel qui peignait, sculptait, creusait des
canaux, bâtissait des églises, inventait des machines de guerre et s’occupait
de toutes sortes de sciences. Le roi, ébloui tout comme moi par ce « sorcier
de génie », découvrit que cet homme vivait dans la pauvreté. Il lui acheta
aussitôt un tableau pour la somme de quatre mille écus d’or. Je ne sais pas si
tu as entendu parler de cette peinture, elle représente « une certaine
dame florentine, faite au naturel, à la demande du magnifique Julien de
Médicis », qui répond au doux nom de Mona Lisa Gherardini del Giocondo.
Oui, La Joconde, c’est bien elle ! Je suis époustouflé par ta
culture. Cette huile peinte sur bois de peuplier exerçait une véritable fascination
sur tous ceux qui venaient y jeter les yeux. J’ai été immédiatement conquis par
la douceur de l’expression de cette chère « dame Lise de la Joconde »
qui représentait pour moi l’image exacte de la mère idéale. Elle m’aurait bien
mieux convenu que la mienne qui n’avait jamais su exprimer la douceur,
l’indulgence ou la sérénité. Elle était d’ailleurs dans l’incapacité de
sourire, contrairement à cette belle Italienne qui avait l’air de s’amuser
qu’on la dévorât du regard ainsi que font les centaines de milliards de paires
d’yeux qui la contemplent depuis cinq siècles.
    Léonard de Vinci, malgré l’alléchante somme d’or offerte
pour ce tableau, ne se résignait pas à s’en séparer. Cet homme âgé de
soixante-trois ans se sentait moralement las et aspirait à un certain repos
bien mérité. Lui qui avait été adulé durant plus de trente ans par les grands
mécènes de l’Italie était subitement gêné dans ses travaux, calomnié et même
accusé de nécromancie. Il nous avouera quelque temps plus tard :
    « Les Médicis m’ont créé et m’ont détruit. »
    François I er devint son sauveur inattendu en
lui proposant de l’accueillir en France et de le loger tout près du château
d’Amboise, au manoir de Cloux [6] . Il le nomma sur-le-champ premier
peintre, ingénieur et architecte de la cour de France avec l’assurance de
recevoir pour les deux années à venir une pension de deux mille écus. Léonard
de Vinci accepta avec empressement et, accompagné de ses deux assistants, il
prit le chemin de sa future demeure qui sera aussi sa dernière.
    Il fallut six voitures pour emporter les objets qui
représentaient toute son existence : ses carnets, ses livres, ses cornues,
ses globes, ses balances, ses dessins, ses creusets, son télescope et six de
ses peintures.
    Pendant que Monsieur de Vinci se rendait au manoir de Cloux,
François I er rencontrait le pape Léon X afin de mettre sur
pied un concordat qui plaçait l’Église de France sous l’autorité du roi. Le
pape accorda à François I er le droit de nommer les évêques et
les abbés, sous réserve bien entendu de son approbation. En échange, le roi
rétablissait l’impôt perçu par le pape dans les églises de France.
    Les quatre mois en Italie qui l’avaient éloigné de son
royaume furent baignés d’une douce folie d’art, il avait dépensé sans compter,
pensionné et acheté dix artistes et cent chefs-d’œuvre et si la bourse royale
n’avait pas atteint son plus haut degré de dépouillement, il aurait acheté tous
les savants, poètes, peintres, sculpteurs et architectes. Louise de Savoie, dès
le premier jour de son retour, fit de lourds reproches à son fils :
    « Je pensais que vous rapporteriez de l’argent
d’Italie, non que

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