Le discours d’un roi
jusqu’à se mettre à genoux pour mimer les détails de la capture ». « Oh, Bertie, comme j’aurais aimé être là », s’écria la reine, gagnée par l’enthousiasme de son mari.
Ce soir-là, assemblés devant leur poste de radio, les Anglais écoutèrent leur roi leur dire :
Il y a quatre ans, notre nation et notre Empire étaient seuls face à un ennemi tout-puissant, le dos au mur, nous avons été mis à l’épreuve plus durement que jamais dans notre histoire et nous avons survécu à cette épreuve. L’esprit du peuple, dévoué et résolu, a brillé comme une flamme incandescente tirée de ces feux invisibles que rien ne peut éteindre.
Une fois encore, nous sommes confrontés à une épreuve suprême. Cette fois, il ne s’agit pas de se battre pour survivre mais de se battre pour faire triompher une cause juste. Une fois encore, chacun d’entre nous devra donner plus que du courage, plus que de la persévérance.
Le roi appela au « réveil de l’esprit », à la formation de « nouvelles réserves invincibles » et au « renouveau de l’esprit conquérant avec lequel nous avons commencé cette guerre et traversé les heures les plus noires ». Il conclut par une citation du psaume 29, 11 e verset : « L’Éternel donnera la force à Son peuple. L’Éternel bénira Son peuple par la paix. »
Le discours correspondait parfaitement à l’état d’esprit du peuple anglais. Tandis que les journaux du lendemain faisaient le récit en images du débarquement, les éditorialistes commentaient avec fierté ce qu’ils considéraient comme l’occasion pour le Royaume-Uni d’effacer l’humiliation subie à Dunkerque quatre ans plus tôt. Le roi reçut plusieurs lettres de remerciement qui lui allèrent droit au coeur. L’une d’entre elles venait de sa mère, la reine Mary. « Je suis content que mon discours vous ait plu, lui répondit-il. C’était une occasion à saisir pour inviter tout le monde à prier. Je voulais le faire depuis longtemps 88 . »
L’opération Overlord fut couronnée de succès. La bataille de Normandie fit encore rage pendant plus de deux mois. Le 21 août, après plus d’une semaine de combats acharnés, la bataille de la Poche de Falaise était enfin gagnée, prenant au piège quelque 50 000 soldats allemands. Quelques jours plus tard, Paris était libéré – la garnison allemande chargée de l’occupation de la capitale rendit les armes le 25 août – et, à la fin du mois, les derniers soldats allemands s’étaient repliés de l’autre côté de la Seine. Les forces britanniques libérèrent Bruxelles le 3 septembre. En octobre, les Allemands avaient été délogés de presque tous les territoires français, belges et du sud des Pays-Bas.
Les Alliés progressaient également en Italie où ils avaient mis le cap sur Rome. À l’aube du 22 janvier 1944, les troupes de la 5 e armée avaient débarqué sur vingt-cinq kilomètres de plage italienne, non loin des stations balnéaires d’Anzio et Nettuno, prenant les Allemands complètement par surprise.
Les premiers débarquements s’étaient tellement bien déroulés et les forces américaines et britanniques avaient rencontré si peu de résistance qu’elles avaient atteint leur objectif du jour avant midi. À la nuit tombée, elles avaient progressé de cinq à sept kilomètres à l’intérieur des terres. Parmi les forces britanniques se trouvaient les Gardes écossais, régiment du sous-lieutenant Antony Logue, fils cadet de Logue.
Le général John Lucas, commandant du 6 e corps de l’armée américaine, commit toutefois une grave faute stratégique et perdit toute son avance en faisant consolider la tête de pont sur la plage. Quand il essaya de reprendre l’offensive à la fin du mois, il se heurta à une résistance acharnée de la part des soldats allemands placés sous le commandement du général Albert Kesserling, qui avait eu le temps d’organiser ses renforts. Les troupes allemandes encerclèrent la plage et firent pleuvoir un déluge de feu sur les Alliés situés en contrebas. Un grand nombre de soldats anglais trouvèrent la mort sur cette plage. Entre le 18 et le 19 février, la situation s’était tellement dégradée que l’on craignait un nouveau Dunkerque. Par miracle, les Alliés s’en sortirent, mais au prix de combats acharnés, ainsi que l’explique Tony dans une lettre écrite le 19 février, à minuit, à la lumière d’une
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