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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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répondre, Tristan s’aperçut que rien d’autre ne comptait pour lui, présentement, qu’un tendre regard de pucelle occupée à deviner ses pensées.
    – Je suis inquiet, confessa-t-il à regret. Inquiet pour… tout.
    S’il excluait Mathilde de Montaigny de sa mémoire, il ne pouvait s’empêcher de comparer, même fugacement, cette Trinité de femmes qui avaient marqué son existence au point qu’il avait songé de façon lancinante au mariage : Aliénor, Oriabel, Luciane.
    – Nous passerons la nuit chez Calletot. Il disposa de plusieurs chambres.
    « Quelle sottise », songea-t-il, « d’insister sur ce détail ! »
    –  Demain, lorsque vous serez reposée comme il convient, nous cheminerons doucement vers Vincennes à cause de Paindorge… qui doit se demander ce que nous faisons pour le laisser seul dans l’entrepont ! Venez, m’amie, allons le voir…
    Il la prit par la main. Les petits doigts fins s’interposèrent entre les siens avec une fermeté qui valait bien des promesses allusives.
    – Tenez-moi toujours ainsi, dit-elle, et je vous suivrai partout.

VII
     
     
     
    –… et votre audace, chevalier, pas plus que votre féauté, ne saurait être ni contestée ni dépréciée. Comment pourrais-je vous reprocher votre échec ? J’avais évalué tous les inconvénients de cette entreprise et me demandais même si la Goberde réussirait à vous approcher des lieux et à vous en ramener. Soupçonneux comme mon père, je vous dirais : «  Qui peut me prouver que vous êtes allé là-bas ? Vos parchonniers (500) ont pu vous abandonner en chemin pour quérir la fortune en quelque meute de routiers. » Mon seul regret, Castelreng, c’est que vous n’ayez aucune preuve ni tangible ni testimoniale à me montrer comme quoi vous avez tenu un moment mon cousin Édouard à votre merci. La navrure de votre écuyer ne saurait me satisfaire.
    Le dauphin Charles allait et venait dans l’espèce de cellule où un clerc avait introduit Tristan. Immobile celui-ci entendait bruire les plis de la pelisse de velours bleu que son hôte portait déceinte, sa main malade dissimulée à l’intérieur et lui tenant lieu d’embonpoint.
    – Non, je vous l’assure : je ne suis pas courcé (501) contre vous…
    Était-ce vrai ? Tristan considérait ce visage livide où refluaient les traces d’une exorbitante affliction. Toutes les bouffissures qu’il y voyait, mouillées de sueur, tous ces plis fourmillant à l’entour de la bouche, et dont la profondeur semblait s’être accusée, exprimaient non seulement la récidive de douleurs profondes, assoupies et tisonnées par la déconvenue, mais encore la rédhibition d’une confiance trop promptement accordée. Comment se disculper ?
    – Monseigneur, je sais bien quelle déception je vous inflige… J’eusse aimé que vous fussiez avec nous pour juger des périls qui furent nôtres…
    Que dire encore ? Rien. Tristan ne savait plus où donner du regard, presque étonné de se retrouver dans l’espèce de reclusoir où le dauphin lui avait assigné cette mission déraisonnable et qui eût pu cependant réussir avec juste un tantinet de bonne chance. Mais la bonne chance n’était pas son lot, ni semblait-il celui de ce prince malade de pouvoir autant que de poison. Dehors, le soleil atteignait son sommet. Sous un vent qui n’était ni la galerne, ni l’autan, des poussières enfumaient la grande cour où les bâtisseurs du donjon, cessant la besogne, s’en allaient prendre leur repas sous les grands arbres, en lisière de la forêt.
    Nous voilà vendredi, le premier de juillet… Vous êtes revenu un jour plus tard que celui où je vous attendais… Maintenant, Édouard le Jeune devrait être jugé pour ses milliers d’homicides et valoir son pesant d’or… Je vais devoir reconsidérer l’avenir…
    Ce préambule entrecoupé de soupirs parut à Tristan le prologue d’un congé formulé sèchement. Il entendit la porte s’ouvrir et se refermer dans son dos : l’huissier d’armes de monseigneur Charles s’en allait. Il demeurait. Pour subir quelle déconvenue ?
    – Je n’ai guère dormi les nuits de votre absence.
    Soudain transfiguré, l’air las et papelard du prince exprima la contention vers un idéal de grandeur qui dépassait son personnage maladif pour irradier vers une sorte de sainteté à laquelle le pape lui-même n’eût sans doute osé prétendre.
    – Ah ! Oui, je n’ai guère dormi, Castelreng. Mon

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