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Les chevaliers de la table ronde

Les chevaliers de la table ronde

Titel: Les chevaliers de la table ronde Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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ne vous emportez pas ainsi et quittez votre
chagrin ! Le roi a agi de la sorte pour le bien commun et pour sauver le
royaume. Sachez en effet qu’est né en ce mois, dans ce pays même, un enfant
dont les agissements et les intrigues provoqueront la destruction du royaume et
la mort de tous ceux qui le défendront. Ce royaume restera donc orphelin et
privé de tout bon roi et de tout bon baron. C’est parce qu’il a voulu éviter
que cette catastrophe ne se produisît de son vivant que le roi a agi ainsi avec
les enfants. – Mais, dirent encore les barons, peux-tu nous dire ce qu’il est
advenu de nos enfants ? – Assurément, répondit Merlin. Je peux vous
affirmer que tous vos enfants sont sains et saufs et qu’ils ont tous échappé à
la mort, car Notre Seigneur ne voulait pas qu’ils périssent. Ils sont
actuellement en grande sûreté et je sais que vous les reverrez avant dix ans, en
parfaite santé et prêts à servir notre royaume. » Réconfortés par ce que
leur disait Merlin, les barons s’apaisèrent, car ils ajoutaient entièrement foi
aux paroles du devin. Ils déclarèrent alors qu’ils pardonnaient au roi et qu’ils
ne lui tiendraient plus rigueur de leur avoir enlevé leurs enfants. C’est ainsi
que Merlin réconcilia le roi Arthur et ses barons, sans quoi il y aurait eu de
grands troubles dans le royaume [34] .
    Car Arthur, tout roi consacré et reconnu qu’il était, avait
bien du mal à maintenir l’harmonie entre les hommes qui l’entouraient. C’étaient
certes de bons chevaliers, de braves guerriers, mais leur fougue et leur
susceptibilité étaient parfois la cause de bien des querelles, certaines d’entre
elles se terminant tragiquement. C’est ainsi qu’un homme du nom de Ligessoc, qui
s’était souvent distingué dans les combats par son courage et son habileté, avait
eu une violente dispute avec un des familiers du roi et l’avait tué. Furieux, Arthur
voulait qu’on fît justice du meurtrier. Mais Ligessoc s’était enfui et était
allé chercher refuge au monastère de Llancarfan, dont l’abbé était alors le
sage Cadoc, un homme d’une grande bonté et qui savait défendre les prérogatives
des clercs face aux prétentions des barons. Cadoc, au nom du droit d’asile, donna
la permission à Ligessoc de s’établir dans le monastère pour une durée de sept
ans. Arthur en fut averti, mais, tout assoiffé de vengeance qu’il était, il ne
pouvait rien faire : s’il s’était emparé de Ligessoc par la force, il aurait
commis un sacrilège, puisque celui qu’il poursuivait se trouvait dans un
endroit sacré.
    Alors le roi prit avec lui quelques-uns de ses chevaliers et,
remontant le long du fleuve Wysg, il s’approcha de Llancarfan. Là, il envoya
des messagers vers Cadoc pour demander à celui-ci de venir lui parler. Cadoc, accompagné
de ses moines, se rendit à cette entrevue, mais sur l’autre rive du fleuve, où
il demeura prudemment, car il n’avait aucune confiance en Arthur. Le roi lui
demanda de lui livrer Ligessoc, ou du moins, puisque Cadoc paraissait
cautionner le fugitif, de lui fournir lui-même une compensation pour la perte
du serviteur que Ligessoc avait tué.
    Cadoc lui répondit : « Il m’est impossible de te
remettre Ligessoc, car il s’est placé sous la protection de Notre Seigneur, et
je l’ai autorisé à demeurer dans le monastère pour une durée de sept ans. Je
serais un parjure si je revenais sur une telle décision. – Eh bien, dit Arthur,
donne-moi au moins une compensation. » Le moine dit alors : « Je
suis prêt à te donner cette compensation. Que réclames-tu ? » Arthur
réfléchit un moment, puis il s’écria qu’il voulait un troupeau de vaches. Mais
il exigeait que ces vaches fussent à moitié rousses et à moitié blanches.
« Tu les auras bientôt », répondit Cadoc.
    Il se retira avec ses moines. Quelque temps après, il revint,
poussant devant lui un magnifique troupeau de vaches telles qu’Arthur les avait
réclamées, à moitié rousses et à moitié blanches. Arthur se dit qu’il n’y
perdait pas au change, car ce troupeau valait une belle fortune. Les moines
poussèrent les vaches sur le gué. Les compagnons d’Arthur se hâtèrent pour en
prendre possession : ils s’avancèrent dans l’eau à la rencontre du troupeau,
mais lorsqu’ils voulurent se saisir des bêtes, ils n’eurent plus entre leurs
mains que des touffes de fougères. Arthur entra dans une grande colère

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