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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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s’égarait
au-dessus de ma tête. Elle ne m’écoutait plus. Dès lors que je lui avais assuré
que les foudres royales n’allaient pas s’abattre sur Claude, les péchés de son
fils, non plus que ceux de Louise-Marguerite, embarrassaient peu sa conscience.
Elle les pardonnait, comme elle s’était sa vie durant pardonné les siens :
son haut rang excusait tout. Et d’après ce que j’avais ouï de la bouche de mon
père, son confesseur ne la détrompait pas, trouvant disconvenable de tabuster
sur de petites faiblesses de la chair une princesse du sang.
    Pour moi, j’étais déçu par le rôle joué dans l’infortune de
Luynes par la princesse de Conti. Jusque-là, j’avais jugé Louise-Marguerite
plus coquette que libertine et déjà j’avais été surpris d’apprendre que son
grand amour pour Bassompierre n’était pas le seul à occuper sa vie tumultueuse.
Mais par tous les diables, jouer les entremetteuses ! Et prêter son propre
lit en plein Louvre à son frère pour qu’il y coqueliquât avec une haute dame,
et si proche du roi ! Il y avait là quelque chose de vilain qui sentait
quelque peu le soufre.
    Je sais bien que Louise-Marguerite avait alors atteint
trente ans, âge auquel les dames de ce pays sont accoutumées de penser qu’elles
sont au bord de la vieillesse, pensée qui les éperonne à user au mieux (et
parfois au plus mal) du temps qui passe, et qui passe si vite. Cet âge-là
devrait faire grand peur aux maris, même s’ils sont aussi beaux et brillants
que Bassompierre, car si l’humeur de leurs épouses les incline à l’amour, il
devient presque impossible alors de trouver remède à leur insatiableté.
    Louis savait parfaitement ce qu’il en était de la princesse
de Conti et de Madame de Luynes, et bien qu’il fût clos là-dessus comme une
huître, il lui échappa de leur donner dans la suite des surnoms. La première,
il l’appela « le péché » et la seconde « le diable ». Je
suis donc bien assuré qu’il se désolait qu’elles fussent les amies les plus
intimes d’Anne d’Autriche, exerçant sur elle, par leur exemple, leurs frivoles
entretiens et les lectures qu’elles lui conseillaient, la plus dangereuse
influence. Mais qu’y faire ? Le roi pouvait assurément battre froid au
« diable » comme au « péché », mais il ne pouvait retirer
la première de la maison de la reine sans déplaire à son favori, ni chasser la
seconde sans offenser les Guise.
    Rassurée et repue, Madame de Guise ne demeura pas longtemps
silencieuse. Elle avait encore un fils à mettre sur la sellette : moi, et
elle n’y faillit pas, brandissant une autre marotte : maintenant que
j’étais le comte d’Orbieu, et seigneur d’un grand domaine, mon devoir le plus
clair et, elle osait dire, le plus sacré était de me marier et de faire souche.
Mais comme mon lecteur connaît déjà l’antienne, je vais couper court à ce
ressassement. Pour l’instant du moins, j’abhorrai ce mot « souche
« qui me réduisait à n’être qu’une racine… Pis même : l’ancêtre d’une
lignée future ! Que diantre ! J’étais jeune encore ! Ne
pouvais-je demeurer maître de mon heure et de mon choix ? Tout ce que je
demandais à’steure, c’est qu’on me laissât la bride sur le col pour servir le
roi de mon mieux et rétablir le domaine d’Orbieu.
     
    *
    * *
     
    Déagéant était celui des conjurés du vingt-quatre avril que
je voyais le plus et pour qui j’avais le plus d’estime, tant pour l’adamantine
résolution qu’il avait montrée au cours de notre périlleux complot (alors que
Luynes, mol et vacillant, ne parlait que d’ajournement et de fuite) que pour
ses grandes capacités. Car c’était un homme d’un savoir infini qui portait à
tout un esprit vif et pénétrant, entendait les affaires mieux que personne, y
trouvait des solutions, et ne répugnait pas à se donner peine pour les faire
aboutir.
    Louis, reconnaissant ces grandes qualités, l’avait nommé
intendant des Finances et membre de son Conseil, et Déagéant pouvait espérer à
la mort du président Jeannin qui était vieil et mal allant se hausser jusqu’à
la surintendance des Finances et devenir secrétaire d’État. Et assurément, il
eût été un grand ministre, s’il avait eu autant d’entregent que de talents.
    Mais n’étant ni noble d’épée, ni même noble de robe, sans
soutien à la Cour, sans lien avec la bourgeoisie des grands offices, personne
n’avait

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