Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les voyages interdits

Les voyages interdits

Titel: Les voyages interdits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
conclut la princesse. La rumeur court que Teobaldo pourrait être le
prochain pape.
    — Quoi ? lâchai-je étourdiment, si surpris
que j’en oubliai la formule de politesse requise. Mais il vient de nous dire
qu’il n’était même pas prêtre !
    — C’est également un homme très âgé, précisa la
princesse. Mais il semble bien qu’en l’occurrence ce soit son principal atout.
Le conclave se trouve dans l’impasse, chaque faction cherchant comme d’habitude
à pousser son candidat favori. Les laïcs commencent cependant à donner de la
voix ; ils exigent un pape. Visconti pourrait à la rigueur leur convenir,
il constituerait aux yeux des cardinaux un compromis acceptable, justement parce
qu’il est vieux. Ce qu’ils souhaitent, c’est que le trône pontifical soit
pourvu, mais pas pour trop longtemps. Juste assez pour que les diverses
factions aient le temps de mener leurs intrigues à leur terme, afin que leur
champion puisse coiffer la tiare pontificale dès que Visconti, décédé, la
laissera choir.
    Et le prince Edouard d’achever, espiègle :
    — Ce qui ne saurait tarder. S’il trouve Rome dans
le même état que Liège, Acre... ou Venise, l’apoplexie sera foudroyante !
    Mon oncle sourit et glissa :
    — Vous voulez parler de leur côté... babylonien,
c’est bien cela ?
    — Précisément. C’est la raison pour laquelle, je
pense, vous aurez les prêtres que vous espérez. Visconti grommellera peut-être
pour la forme, mais il se réjouit, au fond, d’envoyer à l’autre bout du monde
tous ces prêtres d’Acre. Les ordres monastiques sont en principe présents sur
place pour répondre aux besoins des combattants. Il se trouve que, dans les
faits, les nonnes conçoivent leur tâche d’une façon que je qualifierais de...
fort libérale, pour le moins. En plus de l’aide hospitalière et des
soulagements spirituels qu’elles procurent, elles prodiguent en effet certains
services qui, je crois, consterneraient quelque peu les fondateurs de leurs
ordres respectifs. Vous devinez quelles sortes de besoins masculins assurent
carmélites et clarisses, et ce, de la façon la plus lucrative. Dans le même
temps, moines et religieux s’enrichissent, eux, en pratiquant avec les gens
d’ici les commerces les plus illicites, revendant par exemple sans vergogne les
provisions et les médicaments offerts à leurs monastères par des chrétiens au
grand cœur repartis en Europe. Les prêtres, de leur côté, n’hésitent pas à
vendre des indulgences et à se livrer à un trafic éhonté fondé sur d’absurdes
superstitions. Avez-vous déjà vu ce genre de chose, par exemple ?
    Il exhiba une bande de papier écarlate et la tendit à
mon oncle, qui la déplia et lut à voix haute :
    — « Bénis, ô mon Dieu, et sanctifie ce
document, afin qu’il contrarie les œuvres perfides du Démon. Celui qui portera
sur sa personne cette sainte proclamation sera à jamais libéré de l’influence
malfaisante du diable. »
    — Il y a vraiment un marché pour ce genre de
barbouillage, ne serait-ce que parmi les hommes qui partent au combat, ajouta
sobrement le prince. Et ce pour les guerriers des deux camps, Satan étant
l’ennemi aussi bien des chrétiens que des musulmans. Les prêtres traitent
aussi, moyennant une petite pièce d’un dinar, les blessures à l’eau bénite. Je
parle de toutes les blessures de ces hommes, n’est-ce pas, qu’elles soient
entailles à l’épée ou lésions résultant de la syphilis, ces dernières étant les
plus fréquentes.
    — Bénissez le Ciel de pouvoir quitter Acre,
soupira la princesse. Si nous pouvions en faire autant...
    Oncle Matteo les remercia de l’audience qu’ils nous
avaient accordée, et nous prîmes tous deux congé. Il m’annonça qu’il rentrait à
l’auberge, car il souhaitait savoir si son onguent dépilatoire était
disponible. J’en profitai pour aller flâner de par la ville, dans l’espoir
d’entendre des mots de farsi et de les mémoriser, comme le prince Edouard me
l’avait recommandé. J’allais effectivement en apprendre quelques-uns, quoique
pas nécessairement ceux qu’il aurait approuvés.
    Je tombai sur trois garçons natifs de la ville, dont
les noms étaient Ibrahim, Dahoud et Nasser. Ils ne parlaient que quelques rares
mots de français, mais nous réussîmes tout de même à communiquer (les garçons y
parviennent toujours), dans le cas présent à l’aide de force gestes et
grimaces. Nous

Weitere Kostenlose Bücher