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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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leur
chef devait, suivant sa volonté dernière exprimée, à Sainte-Hélène, devant
Bertrand et Montholon, reposer au bord de la Seine, au milieu du peuple
français que j’ai tant aimé ».
    Les anciens des Affaires secrètes et Reconnaissances, comme Blaise
et son ami, qui avaient si souvent approché l’empereur et restaient
dépositaires de secrets que rien ni personne ne pourrait jamais leur arracher, ne
cessaient de rappeler, parfois avec véhémence, à leurs anciens compagnons d’armes
passés au service de la monarchie restaurée, qu’ils devaient obtenir la restitution,
par les Anglais, du corps de l’empereur. Tous se plaisaient à dire, sans
preuves, que le retour des restes de Napoléon I er restait « une
exigence profonde du peuple ».
    On se souvenait, bien sûr, que les démarches effectuées au
lendemain de la mort de Napoléon par Madame Mère, puis par Bertrand et
Montholon étaient restées sans effet, les Britanniques ayant même envisagé un
moment de transporter le cercueil de l’exilé en Angleterre, pour en faire l’ornement
d’un musée !
    Depuis 1822, de nombreuses tentatives avaient été faites
pour obtenir, des souverains successifs et des gouvernements en place, la
restitution à la France « des cendres de l’empereur Napoléon déposées en
terre d’exil ».
    Ni Louis XVIII ni son successeur Charles X, renvoyé
par la Révolution de 1830, n’avaient cédé aux pétitionnaires. L’avènement de
Louis-Philippe, le 9 août 1830, souverain réputé moins rancunier et plus
libéral, avait ranimé les espoirs des bonapartistes, mais il avait fallu attendre
le 22 février 1834, après que la statue de Napoléon eut retrouvé sa place
sur la colonne Vendôme, pour que, trois nouvelles pétitions ayant été déposées,
la question du retour des cendres de l’empereur fût à nouveau évoquée devant
les députés. Cette fois, les élus avaient accepté de transmettre les pétitions
au Conseil des ministres. Un premier pas avait ainsi été franchi mais le ministère
avait classé le dossier sans donner d’explication. Les agissements du prince
Louis Napoléon, comploteur et prétendant avoué, incitaient le gouvernement à
écarter la gloire de l’oncle, pour ne pas stimuler les ambitions du neveu !
    D’après les informations connues de Blaise et de Claude, le
Retour des Cendres – quelques journaux l’écrivaient maintenant avec une
majuscule – ne pourrait être organisé avant la fin de l’année 1840. Il fut
décidé, au cours d’une réunion à Beauregard, qu’on irait, en famille, à Paris
pour assister aux cérémonies, déjà annoncées par les journaux, et qu’on
emmènerait Alexandra, dont ce serait le premier grand voyage. Discret et
généreux, Blaise de Fontsalte se rendit quelques jours plus tard à Genève pour
faire savoir aux derniers grognards du café Papon encore valides qu’il leur
offrirait voyage et séjour en France, à l’occasion du retour des cendres de l’empereur.
    — Nous devons cette ultime faveur à ceux dont Bonaparte
a façonné le destin, hier fait de courage, de souffrances et de gloire aujourd’hui
de dénuement, de solitude et d’amertume, dit Blaise approuvé par tous.
    Ils lurent, quelques jours plus tard, sans grande surprise, dans
la Gazette de Lausanne du 26 mai, que M. Noverraz, ancien
valet de chambre de l’empereur Napoléon, s’était rendu à Paris, dans le but de
demander un passage sur les bâtiments qui devaient se rendre à Sainte-Hélène
pour y recueillir les cendres du grand homme. Le journaliste précisait :
« Le bateau partira le 7 juillet de Toulon, pour un voyage de 4 030 miles.
Le retour est prévu fin novembre. »
    Blaise de Fontsalte et Claude Ribeyre de Béran se
félicitèrent de l’initiative de Jean-Abram Noverraz, qu’ils tenaient tous deux
en grande estime, et furent heureux d’apprendre, un peu plus tard, qu’Adolphe
Thiers, président du Conseil, avait donné son accord pour que le Vaudois
participât à la mission. La fidélité sans concession de Jean-Abram Noverraz
pour « son seul maître » – il avait refusé les fonctions
offertes par deux souverains en disant : « Celui qui a servi l’empereur
ne doit plus jamais servir » – était ainsi reconnue et récompensée. Il
serait des rares anciens proscrits volontaires de Sainte-Hélène qui s’en
iraient recevoir des Anglais les restes de Napoléon.
    Ce bel homme de cinquante ans, d’une extrême

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