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Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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Cette dernière souffla dans le sac à deux reprises, cligna des yeux parce qu’elle s’y était envoyé de la poussière de céréale, puis finalement se mit à laper.
    Emilie invita son père à manger une soupe. Elle savait qu’il avait horreur de prendre la route l’estomac vide. Il sapa sa satisfaction et la suivit. Ils mangèrent en tête à tête. Caleb sur la chaise droite, Émilie sur la chaise berçante qu’elle avait approchée de la table et immobilisée en installant deux blocs de bois sous les balanciers. Son père trouva le manège astucieux. Ils parlèrent peu durant le repas, se contentant de sourire quand l’étalon poussait un hennissement encore plus désespéré que le précédent.
    «Pour moi, il se ferait pas prier pour la servir. C’est bien de valeur qu’elle soit déjà pleine parce que, je te mens pas, je lui aurais fait sauter la clôture. Peut-être bien que l’année prochaine on pourrait organiser ça. En tout cas, il doit savoir ce qu’il dit, parce que même pleine, la jument a pas l’air rétive.»
    Émilie sourit. Elle connaissait l’engouement de son père pour les chevaux. Elle lava et rangea la vaisselle sur une des étagères. Caleb se leva à son tour, regarda l’heure et décida qu’il était temps de partir s’ils voulaient atteindre le chemin principal avant la complète tombée de la nuit. Émilie acquiesça. Ils descendirent et Émilie ferma soigneusement la trappe qui menait à ses quartiers.
    Les flammes du poêle agonisaient. Aussi — simple précaution — elle ferma complètement la clé, puis la tourna d’un quart de tour. De cette façon, elle était assurée qu’il n’y aurait pas de fumée si la flamme se ranimait. Elle jeta un coup d’œil autour de la pièce. Tout lui sembla en ordre. Son père était déjà dehors. Il avait replacé les briques chauffées sur le plancher de la voiture. Il savait qu’elles n’étaient pas encore vraiment essentielles à leur confort, mais il aimait se garder les pieds chauds quand il avait un long trajet à faire. Il s’assit et cria à Émilie de se dépêcher. Elle sortit en courant, ferma la porte, puis demanda à son père d’attendre, rentra, se dirigea vers son pupitre et en sortit les papiers qu’elle y avait rangés. Encore une fois, elle changeait d’idée car elle avait compris que ces papiers étaient les seuls liens, les seuls témoins de sa nouvelle existence. Elle avait besoin de les emporter pour être convaincue de son retour. Elle sortit aussi rapidement que la première fois, ferma vigoureusement la porte, lui donna un coup de hanche pour s’assurer que le loquet était bien enclenché avant de la verrouiller. Caleb approcha la voiture et elle monta.
    L’étalon poussa un véritable cri d’agonie quand il les vit s’éloigner. La jument se cambra, mais Caleb vint à bout de sa courte hésitation.
    «Elle est peut-être pus bien belle, mais au moins est docile.»
    Émilie sourit. Elle se couvrit les cuisses avec les couvertures que Caleb avait pensé apporter. La jument adopta un trot confortable. Le père et la fille se taisaient, regardant le soleil qui commençait à s’étirer sur l’horizon. Émilie inspira bruyamment. Elle aimait l’odeur de l’automne. Elle aimait le soleil de l’automne qui lui faisait des clins d’œil à travers les branches maintenant dénudées. Elle se tourna pour regarder une dernière fois sa petite école qui miroitait de toutes ses fenêtres, bien calée à la rencontre de deux collines. Il sembla à Émilie que l’école s’appuyait sur leurs pentes pour se protéger des grands vents. Caleb jeta un coup d’œil vers sa fille au moment où, discrètement, presque sensuellement, elle envoyait un baiser au décor qu’elle quittait. Elle se retourna et fixa la route.
    Caleb avait secrètement espéré qu’Émilie revienne sur sa décision. Il avait entretenu l’espoir qu’elle lui annonce son retour à la maison. Qu’elle lui dise qu’elle s’ennuyait. Mais le ton de ses lettres, mais ce regard de velours qu’elle venait de lancer à une toute petite école lui fit comprendre que sa fille était à jamais partie. Comment avait-il pu penser qu’elle s’ennuierait? Elle n’avait jamais trouvé le temps de faire tout ce qu’elle voulait faire.
    Caleb se rappela que son grand-père lui avait raconté que leur ancêtre, Antoine Bordeleau, un soldat du régiment de Carignan, avait épousé une fille du Roy. Après qu’elle lui eut

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