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Services Spéciaux - Algérie 1955-1957

Services Spéciaux - Algérie 1955-1957

Titel: Services Spéciaux - Algérie 1955-1957 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Aussaresses
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l’avait chargé lors de l’expédition de Suez, quelques semaines plus tôt.
    Les Égyptiens avaient subi de lourdes pertes. Leurs cadavres jonchaient les routes, exposés à la chaleur. Massu avait donné l’ordre au colonel Brothier, qui commandait alors le 1 er REP, de faire disparaître ces corps. La section Le Pen avait été désignée pour cette tâche peu ragoûtante. Le Pen s’en était acquitté avec beaucoup de conscience et n’avait négligé aucun des égards particuliers qui étaient dus à des combattants musulmans. Réquisitionnant des prisonniers, il avait fait creuser une immense fosse, en prenant soin qu’elle fut tournée vers La Mecque. Il avait poussé le zèle jusqu’à faire déchausser les cadavres.
    Le lieutenant était d’une grande rigueur lorsqu’il était en service, mais quand son régiment n’était pas en opérations – ce qui était rare – il passait pour assez turbulent. On disait qu’il affectionnait de se défouler en déclenchant des bagarres dans les lieux les plus chic.
    Ainsi, lorsqu’on le croisait dans son endroit préféré, le bar du légendaire hôtel Saint George, qui avait accueilli toutes les célébrités d’Europe, il n’était pas rare de le voir chercher querelle à ceux dont il avait décidé que la tête ne lui revenait pas, au grand dam de Thomas, le barman arménien.
    Pour ma part, j’évitais le Saint George, pour une raison que personne à Alger n’aurait pu deviner. Par une étrange coïncidence, mon père avait connu, au cours de ses études, l’un des fondateurs de cet hôtel et les Aussaresses figuraient maintenant parmi les principaux actionnaires de l’établissement. Mais j’avais souvent entendu mon père se plaindre du médiocre rendement de ce placement. Il reprochait à ses associés de ne pas lui verser son dû. C’était pour cette raison que je boycottais ce prestigieux établissement algérois, lui préférant l’Aletti qui était un peu moins huppé.
    Si nous avions pris l’habitude de nous tutoyer, Borniol et moi, ce n’était donc pas parce que nous traînions dans tes mêmes bars, mais parce que nous avions appartenu tous les deux aux Jeunesses étudiantes chrétiennes.
    Le Pen semblait tout étonné que je ne lui parle pas de l’événement du jour :
    —  Tu es au courant de ce qui est arrivé, au moins ?
    —  Quoi donc ?
    —  Eh bien, de ce qui est arrivé au grand chef, ou plutôt de ce qui a failli lui arriver car il s’en est fallu de peu.
    —  Quoi ! Massu ?
    —  Non, Salan !
    —  Raconte.
    Le Pen éclata de rire.
    —  Ma parole, il ne sait rien ! Eh bien, tu as bonne mine, pour un type qui est censé être le mieux renseigné d’Alger !
    C’est ainsi que Jean-Marie Le Pen m’apprit ce qui s’était passé. Grâce à une machine infernale rudimentaire bricolée avec deux tuyaux de gouttière, on venait de tirer deux roquettes dans le bureau du général Salan, commandant en chef et commandant de la région militaire. Salan était indemne mais un de ses collaborateurs, le commandant Rodier, n’avait pas été raté.
    Quelques heures plus tard, à la réunion secrète du matin, Massu commença à nous engueuler.
    Trinquier ne disait rien.
    —  Alors, c’est comme ça que vous vous occupez des fels ?
    —  Mon général, protestai-je, cette affaire n’est absolument pas de notre ressort !
    —  Comment ça, pas de votre ressort ? Vous êtes bien là pour liquider les auteurs d’attentats, non ?
    —  Oui, pour liquider les auteurs d’attentats organisés par le FLN.
    —  Et alors ?
    —  Ce n’est pas le FLN qui a fait ce coup.
    —  Et comment pouvez-vous le savoir ?
    _ Parce que le FLN est incapable de maîtriser la technique utilisée. Je suis absolument formel.
    Massu poussa un grognement et réfléchit un instant.
    —  Alors, qui a bien pu faire le coup ? demanda-t-il.
    _ Plutôt les cocos, à mon avis. Mais il faut voir.
    L’enquête fut confiée à la police judiciaire.
    Le 18 janvier, je rencontrai à ce sujet le commissaire Parat, et, à cette occasion, je fis la connaissance d’Honoré Gévaudan qui, venu spécialement de Paris, l’assistait. Gévaudan avait déjà travaillé à Alger en 1956, quand on avait recherché l’équipe d’Iveton, l’employé du gaz communiste qui avait opéré avec un chimiste pied-noir pour faire sauter Alger. Gévaudan devait m’avouer plus tard qu’il avait bien fallu faire parler Iveton sous la torture,

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